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Téléconsultations : (r)évolution à venir pour les sociétés commerciales ?

Analyse et point d’étape concernant une possible évolution majeure de la règlementation applicable aux actes de télémédecine qui est actuellement portée par le PLFSS 2023 et en cours de discussion devant le Parlement

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Le PLFSS 2023 crée un nouveau régime d’agrément des sociétés offrant des services de téléconsultation, facilitant le système de remboursement des actes et encourageant le déploiement de l’offre de soins en France. 

Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2023 (PLFSS), actuellement en cours de discussion devant le Parlement, propose une importante évolution de l’organisation de la téléconsultation en France. L’actuel article 28 du PLFSS, qui vient d’être présenté devant le Sénat, prévoit en effet la création d’un régime d’agrément applicable aux sociétés de téléconsultation, permettant la prise en charge par l’assurance maladie des actes de téléconsultation réalisés par ces sociétés.

Quel est l’objectif de ce nouveau régime d’agrément et quelles en seraient les conditions ?

La rédaction de l’article 28 du PLFSS, telle que présentée au Sénat, a pour objectif principal d’étendre l’offre de soins disponible pour les assurés sociaux en permettant aux sociétés de téléconsultation, sous certaines conditions, de proposer des actes de téléconsultation pris en charge par l’assurance maladie.

Pour ce faire, en l’état actuel de la rédaction du texte, les sociétés concernées devront répondre à différentes conditions :

  1. des conditions de structuration. Les sociétés de téléconsultation devront :
  • être agréées par les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé ;
  • avoir pour objet, de manière exclusive ou non exclusive, de proposer une offre médicale de téléconsultations ;
  • exercer sous la forme d’une société commerciale (les formes de sociétés civiles sont exclues).
  1. des conditions de détention. Les sociétés de téléconsultation ne pourront pas être sous le contrôle, au sens du droit commercial, d’une personne physique ou morale exerçant une activité de fournisseur, de distributeur ou de fabricant de médicaments, de dispositifs médicaux ou de dispositifs médicaux, sauf pour les dispositifs permettant la réalisation d’un acte de téléconsultation.
  2. des conditions opérationnelles. Les sociétés de téléconsultation devront :
  • s’assurer que leurs outils et services numériques respectent les règles relatives à la protection des données personnelles ainsi que les référentiels d’interopérabilité,  de sécurité et d’éthique applicables aux services numériques en santé ;
  • proposer la réalisation des actes de téléconsultation par des médecins qu’elles salarient ;
  • mettre en place un comité médical, dès lors qu’elles emploient plusieurs médecins. Ce comité médical doit comprendre des représentants des usagers et a pour objectif de (i) donner un avis sur la politique médicale de la société et son programme d’actions, (ii) contribuer à la définition de sa politique médicale et à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, et (iii) s’assurer de la cohérence de la formation médicale continue des médecins salariés de la société ;
  • élaborer, après avis du comité médical, un programme d’actions assorti d’indicateurs de suivi visant à garantir le respect des obligations qui leur sont applicables.

Quelles seraient les modalités de contrôle par les autorités?

Les sociétés de téléconsultation agréées seraient soumises à différents types de contrôle et d’évaluation :

  • un contrôle des ministres de la sécurité sociale et de la santé, pour l’obtention et le renouvellement de l’agrément ;
  • un contrôle du conseil départemental de l’ordre des médecins compétent portant sur :
    • le programme d’actions ayant pour objet de garantir le respect des obligations à la charge de la société concernée ;
    • le rapport annuel d’activités de la société;

ces éléments devant être transmis par la société à la fois au conseil départemental de l’ordre des médecins compétent et aux ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé ;

  • un contrôle de l’Agence numérique en santé, ou d’un autre organisme de certification accrédité selon certaines conditions, pour la conformité des services de téléconsultation aux référentiels d’interopérabilité, de sécurité et d’éthique ;
  • une évaluation de la part de la Haute Autorité de Santé de la qualité de la téléconsultation selon un référentiel de bonnes pratiques professionnelle relatives à la qualité de la téléconsultation applicable à ces sociétés, que la Haute Autorité de Santé aurait préalablement publié.

Que changerait ce nouveau régime?

L’objectif poursuivi par ce nouveau régime est de permettre la prise en charge des actes réalisés par les sociétés de téléconsultation répondant à un certain niveau de qualité et de transparence et se distinguant ainsi des autres sociétés dans le secteur de la télémédecine. L’absence actuelle de règles adaptées à l’offre de soins proposée par les sociétés commerciales de téléconsultation, cumulée aux règles restrictives de prise en charge des actes de téléconsultation a conduit les acteurs du secteur à créer des structures dans un cadre réglementaire incertain.

Diverses formes de structures sont actuellement mises en place sur le marché, notamment  la combinaison de structures commerciales et associatives via des centres de santé ou des partenariats avec des structures d'exercice libéral.

A l'instar des montages dans d'autres activités de santé (par exemple, dans les secteurs de biologie médicale, médecine vétérinaire, dentaire, radiologie médicale), la mise en place de ces structures nécessitent de l'ingénierie juridique, sans pour autant toujours pouvoir répondre de manière totalement satisfaisante aux besoins des acteurs du marché. Il peut être espéré que le nouveau régime apporte un cadre permettant le développement et une organisation efficace de ce marché porteur.   

Quelles seraient les prochaines étapes si le texte était adopté ?

Le projet de texte actuel prévoit que divers aspects du régime devront être précisés par décret. Seront notamment concernées les modalités d’obtention de l’agrément, sa durée, les conditions de suspension ou de retrait de l’agrément. Par conséquent, ce nouveau régime ne serait vraisemblablement pas applicable au lendemain de la publication de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, mais pourrait entrer en vigueur quelques mois plus tard.

Que peut-on attendre à ce stade des discussions concernant ce projet d’article ?

Le Sénat a d’ores et déjà proposé des amendements. L’un d’entre eux vise à supprimer ce nouveau régime, d’autres ont pour objet d‘introduire des conditions supplémentaires au régime d’agrément.

Parmi ces amendements, certains visent à :

  • soumettre aux exigences du parcours de soin la prise en charge des actes de téléconsultation ;
  • limiter le nombre d’actes pris en charge au cours d’une période déterminée ;
  • soumettre la prise en charge des actes à une autorisation de l’Agence Régionale de Santé du lieu d’implantation de la société lorsque la société réalise les actes au moyen d’équipements dédiés ;
  • soumettre la prise en charge à la satisfaction de critères de qualité et de fiabilité des outils numériques utilisés ;
  • insérer les actes proposés par les sociétés de téléconsultation dans une offre locale de soins incluant une présence physique ;
  • soumettre les sociétés agréées à l’obligation de se conformer au référentiel Hébergeur de Données de Santé.

L’Assemblée nationale avait déjà ajouté des conditions au régime initialement proposé, on peut s’attendre par conséquent à ce que certains des amendements déposés intégrant des conditions supplémentaires rendent ce nouveau régime trop restrictif, ce qui irait à l’encontre de l’objectif initial visant à étendre l’accessibilité de l’offre de soins en France.

Prochaines étapes

Ces développements pourraient avoir un impact majeur sur les acteurs du secteur de la télémédecine et de services de santé en France.

N’hésitez pas à contacter Mikael Salmela, Fabien Charissoux et Joséphine Pour en cas de questions sur cette actualité ou relatives à la règlementation applicable à la télémédecine en France.

 

Authored by Mikael Salmela, Fabien Charissoux et Joséphine Pour.

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