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Notre équipe en droit social revient sur la publication du décret relatif à la présomption de démission pour abandon de poste, qui marque l’entrée en vigueur du dispositif en France, ainsi que sur les précisions apportées par le Ministère du travail dans un Questions/Réponses du 18 avril 2023.
Le mécanisme de présomption de démission, créé le 23 décembre 2022, est désormais complété par un décret. En vertu de ce nouveau dispositif, un salarié qui abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail à l'expiration d’un délai précisé dans une mise en demeure de justifier son absence et de reprendre ses fonctions, est présumé avoir démissionné (article L.1237-1-1 du Code du travail).
Le délai minimum pour reprendre le travail est fixé à 15 jours par l’article R.1237-13 du Code du travail, entré en vigueur le 19 avril 2023. Il commence à courir à compter de la date de présentation de la mise en demeure de l’employeur.
Le Ministère du travail a précisé les conditions de mise en œuvre de cette nouvelle procédure dans un Questions-Réponses (QR) du 18 avril 2023. Un éclairage utile sur le dispositif qui n’a toutefois pas de valeur contraignante devant les juridictions. La procédure de présomption de démission reste optionnelle pour l’employeur précise le Ministère du travail (QR 1). L’entreprise peut ainsi renoncer à la mise en demeure et attendre que le salarié reprenne son poste. Dans l’intervalle, le contrat de travail de l’intéressé est suspendu et la rémunération n’est pas due.
En revanche, selon le Ministère du travail, si l’employeur souhaite mettre fin à la relation de travail, il doit mettre en œuvre la procédure de mise en demeure et de présomption de démission et n’a pas vocation à engager une procédure de licenciement pour faute (QR 2). Ce principe n’étant toutefois pas prévu par le Code du travail, il reste à confirmer par les juges.
Le Questions-Réponses du Ministère du travail apporte également les précisions suivantes :
Selon le Ministère du travail, la mise en demeure doit préciser au salarié en abandon de poste les modalités et les conséquences de la procédure engagée à son encontre (QR 2).
Un des points de vigilance sera le sort d’une éventuelle clause de non-concurrence qu’il conviendra de régler selon nous dès l’envoi du courrier de mise en demeure. Cette précaution nous semble souhaitable pour éviter une levée tardive de la clause car, si le salarié ne répond pas à la mise en demeure ou indique qu’il ne veut pas reprendre son poste, sa démission sera effective à la date ultime de reprise fixée par l’employeur (QR 5).
La démission n’étant soumise à aucun formalisme légal, un écrit du salarié confirmant sa démission n’est pas nécessaire selon le Ministère du travail, y compris lorsque la convention collective exige un écrit en cas de démission (QR 6).
Pour faire obstacle à la présomption de démission, le salarié peut se prévaloir d’un motif légitime qu’il devra alors indiquer à son employeur en réponse à la mise en demeure.
Il est prévu une liste (non-limitative) de motifs légitimes, tels les raisons médicales, l'exercice du droit de retrait, l'exercice du droit de grève, le refus du salarié d'exécuter une instruction contraire à une réglementation ou encore la modification du contrat de travail à l'initiative de l'employeur (article R1237-13 du Code du travail). Il n’y a pas d’obligation de produire un justificatif à l’appui du motif légitime expressément prévue par le Code, toutefois le Ministère du travail prévoit la transmission à l’employeur d’un certificat médical daté du jour de l’abandon de poste (QR 4).
Si le salarié répond à la mise en demeure en justifiant son absence par un motif légitime, la procédure de présomption de démission ne devra pas être conduite à son terme (QR 4). Des contentieux sont cependant à anticiper dans une telle situation, la légitimité du motif invoqué pouvant donner lieu à des appréciations divergentes entre employeur et salarié.
Par ailleurs, même si le salarié ne justifie pas son absence par un motif légitime, il pourra selon nous contester la rupture de son contrat devant le conseil de prud'hommes, s’agissant d’une présomption simple de démission.
En cas de présomption de démission, le contrat de travail du salarié est rompu à l’issue du délai fixé par l’employeur dans la mise en demeure.
Concernant le préavis, les règles de droit commun s’appliquent (QR 7). Ainsi, le salarié en abandon de poste qui refuse d’exécuter son préavis n’est pas éligible à une indemnité compensatrice de préavis. L’employeur peut même saisir le conseil de prud’hommes pour solliciter sa condamnation à lui verser les sommes qu’il aurait perçues s’il avait exécuté son préavis (QR 8).
Le salarié n’est pas éligible aux allocations d’Aide au Retour à l’Emploi versées par Pôle Emploi (QR 12).
Rédigé par Marion Guertault, Hélène de Nazelle et Sibille Bouëssel du Bourg.